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"Enfance" - Stephane Laudier et Fanny Rudelle

« Enfance »

Mise en scène : Fanny Rudelle et Stephane Laudier

Comédienne : Fanny Rudelle

Texte de : Nathalie Sarraute


Le Vendredi 9 Octobre, j’ai pu assister à une adaptation théâtrale de « Enfance » à la Géode du lycée Jean Monnet.

Dans l’œuvre originelle, Nathalie Sarraute relate ses souvenirs entre 5 et 12 ans. C’est donc une femme âgée qui raconte des fragments de sa vie d’enfant : c’est une recherche de ce qu’elle a été pendant une partie de sa vie. Cette autobiographie est une des plus atypiques car elle est écrite à deux voix (on peut prendre cela comme une évocation au monde du théâtre). On assiste à une conversation entre le souvenir qu’elle a été (une petite fille / la Nathalie Sarraute du passé) et entre la Nathalie Sarraute physique du présent (celle qui écrit). En somme, Nathalie Sarraute transpose l’enfant qu’elle a été à travers ses émotions. C’est une vision du temps et de la mémoire tout à fait spectaculaire.

 

L’adaptation qu’en on fait Fanny Rudelle et Stephane Laudier est très fidèle sur les grands thèmes de son roman qui sont : le dédoublement de personne selon le souvenir, le rapport au passé et à la mémoire et la représentation de l’immatériel (les émotions).

Grâce à des éléments théâtraux, les metteurs en scène et la comédienne ont réussi à véritablement transposer l’univers de Nathalie Sarraute dans une mise en scène tout à fait contemporaine.

Par exemple, ils ont fait le choix de conserver une neutralité extrême dans le décor et dans les costumes ; cela  se justifie par l’omniprésence du blanc dans l’espace (blanc = innocence = enfance). Ce côté épuré permet de transposer n’importe quel souvenir dans le décor ce qui est un choix assez judicieux. J’ai cependant regretté l’intégration d’un élément qui selon moi était assez incohérent avec le reste de la mise en scène (la balançoire). En effet, bien que la balançoire soit présente dans le récit originel, dans le cas de la pièce, cet élément nous dirige trop vers un souvenir particulier.  On peut cependant remarquer la forte symbolique du plancher. En effet, le plancher semble se poursuivre dans le temps et dans l’espace, cela traduit une ouverture à une continuité du souvenir et de la mémoire. Le noir qui englobe le décor crée l’isolement de cette scène et fait se détacher ce plancher qui est comme l’espace d’un des souvenirs de N.Sarraute.


La lumière est selon moi l’élément du «décor » le plus important, car elle détermine non seulement l’espace et le temps mais aussi les sentiments. C’est une représentation de l’immatériel tout à fait intéressante. Cette traduction du sentiment et du souvenir par la lumière apparaît sous plusieurs formes (ombres chinoises, ombres, clarté, obscurité,…). On retrouve aussi un véritable travail sur l’ombre. J’ai d’ailleurs été assez surprise de cette qualité alors que nous nous trouvions à la Géode. On peut penser que le « dédoublement de personne » qu’effectue Nathalie Sarraute à non seulement été traité par la voix off mais aussi par l’ombre. En effet, le principe de l’ombre est « une deuxième représentation de soi » car tout au long du spectacle (surtout lors des 10 premières minutes) les ombres de la comédienne dansent sur les parois du décor mais aussi sur les murs qui entourent le publique. On peut interpréter que ces ombres sont des représentations du corps de Nathalie Sarraute dans les souvenirs qu’elle exprime et conte.

Concernant le jeu d’acteur, j’ai particulièrement apprécié la performance de Fanny Rudelle à se fondre en un personnage aussi particulier qui exprime beaucoup de sincérité. C’est une œuvre tout à fait atypique car c’est un dialogue sous forme de monologue. On notera aussi l’effort du metteur en scène à obtenir une interactivité entre public et comédienne, bien que le dialogue entre sa « conscience »/son passé et elle-même, occupe une place majeure dans la pièce. La représentation de la communication dans cette œuvre a plusieurs facettes : communication visuelle (comédienne qui exprime les souvenirs par son visage , la lumière qui en exprime également), la communication auditive (voix off) et la communication « parlée » (dialogue).

 

 Pour conclure, en assistant à cette adaptation théâtrale d’Enfance de Nathalie Sarraute, la spontanéité de la comédienne et l’intégrité du spectacle m’ont beaucoup touchée et me semble en total accord avec le livre.

 

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